1660, 1669, 1696 • Entre les premières sonates pour violon de G.A. Pandolfi Mealli et le second recueil de sonates en trio de D. Buxtehude se dessine un paysage musical où l’intime et le spirituel se rejoignent. L’Envers et l’Endroit — formule empruntée à Albert Camus — évoque ce fragile équilibre entre la clarté et le trouble, ce lieu incertain où l’art accepte de ne pas trancher et laisse toute sa place au doute.
De la vie et des œuvres de Giovanni Antonio Pandolfi Mealli, il ne nous est parvenu que quelques bribes. Violoniste de talent et brillant compositeur italien, il aurait été engagé à la cour de l'archiduc Charles-Ferdinand de Habsbourg à Innsbruck entre 1660 et 1669. C’est à cette période qu’il aurait fait publier ses deux recueils de six sonates pour le violon et la basse continue et un recueil de Balletti. Sa musique est envoûtante, libre, d’une expressivité folle et d’une sensibilité à fleur de peau, véritable ode à l’imprévisibilité, aux rebondissements.
Le second recueil de sonates en trio de Dietrich Buxtehude, publié en 1696, réunit sept œuvres pour violon, basse continue et viole de gambe — partie confiée ici au ténor de violon. Entre contrepoint savant et élans lyriques, Buxtehude y laisse transparaître une sensibilité vive, parfois méditative, parfois théâtrale ; une musique qui parle à l’âme autant qu’à l’esprit, pleine de contrastes et de surprises.
Albert Camus écrivait : « Je sais que ma source est dans L'Envers et l'Endroit, dans ce monde de pauvreté et de lumière où j'ai longtemps vécu et dont le souvenir me préserve encore des deux dangers contraires qui menacent tout artiste, le ressentiment et la satisfaction ». C’est aussi entre ces deux pôles que s’inscrit cette musique : jamais amère, jamais complaisante, mais tendue vers quelque chose de plus haut — fragile, libre, profondément humain.
